Les établissements recevant du public (ERP) doivent depuis le 1er janvier 2015 être accessibles aux personnes handicapées. Se pose alors la question de savoir qui doit en supporter la charge : le bailleur ou le locataire ?

La loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pose l’obligation de mise en accessibilité des bâtiments avant le 1er janvier 2015 pour tous les établissements recevant du public (ERP) : toute personne à mobilité réduite ou ayant un handicap doit pouvoir accéder à l’établissement, y circuler et y recevoir les informations qui y sont diffusées.

Sont considérés comme accessibles les établissements ou aménagements permettant à des personnes handicapées de circuler, d’accéder aux locaux et équipements, de communiquer, et de bénéficier des prestations pour lesquelles l’établissement a été conçu. Les conditions d’accès doivent être les mêmes que pour les personnes valides ou, à défaut, présenter une qualité d’usage équivalente.

 

Le non-respect de ces dispositions est constitutif d’un délit et la bonne ou mauvaise foi est indifférente. En effet l’infraction résultant d’une inobservation d’une disposition légale est toujours présumée connue. Plusieurs sanctions sont alors envisageables :

  • L’autorité administrative peut décider de la fermeture de l’établissement qui ne répond pas aux règles d’accessibilité (article L11-8-2 du Code de la construction et de l’habitat) ;
  • Amende de 45.000 euros en cas de méconnaissance des obligations d’accessibilité et une peine d’un mois d’emprisonnement ;
  • S’il y a récidive : 75.000 euros d’amende et six mois d’emprisonnement ;
  • Une amende de 225.000 € pour une personne morale.

Or la plupart des commerces et des immeubles ne répondent pas à ces conditions d’accessibilité.

Le principe des dépenses relatives aux travaux :

En l’absence de clause dans le bail les dépenses d’entretien et de réparations courantes sont à la charge du locataire et celles des grosses réparations à la charge du bailleur.

A cet égard le contrat de bail doit indiquer leurs répartitions entre le bailleur et le locataire. Ainsi généralement les gros travaux listés à l’article 606 du Code civil restent à la charge du bailleur : « Les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières. Celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier. » Cet article vient préciser que « toutes les autres réparations sont d’entretien » donc à la charge du locataire.

Article 606 du Code civil et travaux d’accès des ERP en façade :

Selon l’article 606 du Code civil sont à la charge du bailleur les travaux touchant les « gros murs ». Les travaux de mise aux normes ne concernant pas la structure de l’immeuble pourront alors être mis à la charge du locataire. En revanche les travaux qui impliquent des modifications en façade seront à la charge du bailleur.
En effet, l’article 1719 du Code civil prévoit que le bailleur supporte les coûts résultant de son obligation de délivrance, devant maintenir les lieux en état de servir à l’usage auquel ils sont destinés. Le preneur est alors créancier d’une obligation consistant à la réalisation des travaux d’accessibilité. Comme tout créancier d’une obligation il peut contraindre le bailleur, débiteur, de faire faire à ses frais les travaux d’accessibilité. A cette fin le locataire doit avant toute procédure adresser à son bailleur une injonction par LRAR.

Clauses du bail et travaux ERP :

En matière de bail commercial la loi a longtemps laissé libre la répartition des charges et des travaux entre les parties. A ce titre le contrat de bail pouvait mettre expressément à la charge du locataire tout ou partie des charges et des travaux, pouvant le contraindre à supporter seul l’intégralité des travaux.

Le coût des travaux résultant de la mise en accessibilité des locaux peut ainsi avoir été mis à la charge du locataire (3e Civ., 2 juin 1999, pourvoi n° 97-17.156 ; 16 mai 2000, pourvoi n° 98-20.555 ; 3è Civ., 3 avril 2001, pourvoi n° 99-15.740 ; 3è Civ., 12 octobre 2004, pourvoi n° 03-13.745 ; 3è Civ., 31 octobre 2006, pourvoi n° 05-14.123). Ce transfert de charges doit cependant être stipulé de manière expresse et sans ambiguïté. Ainsi, la clause du bail selon laquelle le preneur prend les locaux loués dans l’état où ils se trouvent au moment de l’entrée en jouissance ne dispense pas le bailleur des travaux occasionnés par la vétusté (3e Civ., 22 février 2005, pourvoi n° 03-19.715). De plus, en matière de bail commercial l’obligation de délivrance revêt une grande importance : le bailleur est obligé, par la nature du contrat et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée (3e Civ. 26 mars 1997, pourvoi n° 95-14.103). Il n’est que très rarement admis que le bailleur puisse transférer au preneur une charge relevant de cette obligation de délivrance.

Cette explicité nécessaire est souvent rappelée par les tribunaux (3e Civ. 1er juin 2005, pourvoi n° 04-12.200). Ainsi le bailleur ne pourra se libérer de son obligation même si le bail comporte une clause en vertu de laquelle le locataire « s’oblige à se conformer rigoureusement pour l’exploitation de son commerce aux prescriptions administratives pouvant s’y rapporter », les travaux prescrits par l’autorité administrative n’étant pas visés expressément. De même pour les clauses visant la sécurité et l’hygiène.

En conclusion deux possibilités :

1) Si une clause du bail met expressément à la charge du locataire les travaux imposés par l’administration (et/ou travaux d’accessibilité) alors le preneur devra réaliser à sa charge les travaux d’accessibilité (Attention : Le fait que les travaux soient à la charge du locataire ne dispense pas ce dernier de demander l’autorisation du propriétaire lorsqu’il y a modification de la structure, et cela même lorsque l’obligation résulte d’une disposition administrative) ;

2) Aucune clause ne met expressément à la charge du locataire les travaux d’accessibilité et/ou les travaux imposés par l’administration, le bailleur est alors tenu d’exécuter à ses frais les travaux d’accessibilité.